5, les roussettes saint-louisiennes sont bénies !

Ci-dessus et ci-après:  
des myriades de roussettes paillées s'envolent de leur dortoir - les vieux arbres de la Gouvernance, et passent au-dessus de la Poste de Saint-Louis avant de se disperser vers l'amont du delta 
2011 09 5 soir © Photos par Eddy Graëff pour Ornithondar

* Saint-Louis et bas-delta du fleuve Sénégal -


SOIR, 19h30, après le Magal des deux rakaas de Saint-Louis-
Comme chaque soir au coeur de 'l'hivernage' - notre mousson ouest-africaine-, des centaines, sans doute des milliers de roussettes paillées (eidolon helvum, straw-coloured fruit bat) s'éveillent à Saint-Louis-du-Sénégal; des vieux arbres de la Gouvernance, où elles se reposent en grappes toute la journée, les mégachiroptères frugivores (les plus grandes chauve-souris d'Afrique occidentale) s'envolent les unes après les autres et envahissent le ciel de l'île patrimoniale avant de se disperser au-dessus du delta. Dans la demi-heure qui suit, on peut alors les apercevoir remontant le fleuve Sénégal et ses affluents; là où des vergers et des palmeraies ont des arbres en fruits, attendez-vous à voir dans la moire crépusculaire une puis deux, trois et plus de ces roussettes amorcer une descente en spirales vers votre jardin, en particulier si vos sapotilliers (achras zapota) ont fructifié. Mais les gourmandes ne feront pas la fine bouche, elles sont goulues et peu raffinées à table, elles goûtent à tous les fruits: chez moi, elles pillent les amandes même vertes des badamiers (terminalia catappa) et, comme les bulbuls diurnes, deux d'entre elles ont un faible pour les drupes du palmier du Mexique (washingtonia robusta); la nuit, je les entends ramper sur les palmes nervurées de l'arbre à l'aide de leurs éperons alaires, et s'y disputer les grappes désirées à grands coups de ricanements nerveux.














Nota:
les roussettes paillées sont présentes dans le delta du fleuve Sénégal de la mi-mai à fin novembre. Ce sont des migrateurs intra-africains, quittant la ceinture forestière où elles résident et se reproduisent pour gagner les zones soudano-sahéliennes, jusqu'aux confins présahariens, à la faveur de la remontée de la mousson. Il y a de fortes fluctuations annuelles dans le nombre de ces chauve-souris en migration: certains dortoirs estivaux - comme je l'ai vu au Burkina Faso dans les ripisylves de la rivière Nazinon, parc national Kaboré Tambi (PNKT)- peuvent accueillir plusieurs dizaines de milliers d'individus !... C'est une aubaine pour les gourmets qui rongent leur frein pendant huit mois pour déguster leur soupe de roussette boucanée, un must dans la plupart des pays qui vont des frontières  guinéo-maliennes au Nigeria. Chasse sans danger, facile, à moindre coût: un seul tir peut faire tomber plusieurs des malheureuses chauve-souris blotties les unes contre les autres dans les arbres, presque à portée de main* (cf. photo ci-après). Il n'y a qu'au Sénégal, en tout cas dans nos lointains atlantiques aux portes du désert, que je n'ai pas observé ce genre d'attrait culinaire pour les chiroptères. Il est vrai qu'en pays de savane et de forêt, la viande est reine, surtout la viande de brousse; rien de tel pour accompagner un houblon rafraîchissant... Assarfoulaye !

* Lire: Burkina Faso, 'chasse aux chauve-souris: une activité florissante', in Le Pays 2011 09 6:

Voir aussi: Les roussettes paillées sont de retour à la Gouvernance, in Ornithondar 2011 05 24

Ci-dessous: 
roussette paillée 'chassée' à Bamako, Mali / Courtesy © photo par Thierry Helsens, DR

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